litterature americaine

Publié le 12 Mars 2019

Quand sait-on que sa vie est ratée ? Quand on veut ressembler à un jeune et que les stigmates de la vieillesse sont là ? Ou que tout se casse la figure à force d'avoir peur ?

Peur de l'amour de son amour qui finit par se marier … avec un autre ? Peur de son agent littéraire dont on ne connait rien de sa vie personnelle ? Telles sont les affres d'Arthur Mineur.

Sa vie a commencé le jour où il a partagé la vie d'un grand poète, bien plus âgé que lui et qui l'a poussé à écrire des romans.

Il a ensuite vécu, de loin semble-t-il, une autre histoire d'amour avec le fils d'un de ses amis. Cette histoire est également finie puisque le jeune homme va se marier avec un autre … et invite Arthur à la cérémonie. Pour échapper à cette invitation, il accepte diverses « invitations » qui le mènent d'un bout à l'autre de la planète. Chaque chapitre relate une de ces errances comme la participation à une conférence au thème abscons, un cours improvisé, une obscure remise de prix. 

Arthur est drôle malgré lui, d'un ennui total en ce qui concerne ses talents d'orateurs, et il saisit les occasions, sans en sentir le droit de les mériter ... Arthur s'estime si peu qu'il ne se sent jamais à la hauteur ou à sa place.

Ce roman, prix Pulitzer, s'appelle « Less », ce qui lui va si bien. Arthur est toujours moins que les autres. Ce titre suggère aussi la constante comparaison que la société inflige à Arthur. Pourquoi se comparer ? Pourquoi avoir peur ne pas être à sa place, à la hauteur ? Et ne pas décider de s'aimer comme on est ? Et ne pas se poser la question d'avoir raté sa vie ou non.

Andrew Sean Greer s'amuse à suggérer des « révélations » qui n'arrivent jamais, petits pièges de l'auteur pour tenir en haleine le lecteur. J'adore.

Ce livre m'a donné beaucoup de plaisir, facile à lire, original, surprenant et drôle. Il m'est arrivé de rire franchement. C'est si rare en lisant.

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Rédigé par Hélène Daumas Objectif Livre

Publié dans #Littérature américaine

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Publié le 5 Mars 2019

Petite lettre à une amie qui veut des conseils pour élever sa fille. Importance des mots : ton mari « t'aide » à l'élever, non il ne t'aide pas, il fait comme toi, il l'élève, c'est tout. Le mariage est une « récompense » pour les filles. Un homme « permet » à une femme de briller, l'inverse n'existe pas ; elle est en coulisses pour sa réussite …

 

Tout est dans les mots pour limiter les maux.

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Rédigé par Hélène Daumas Objectif Livre

Publié dans #Document, #Littérature américaine

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Publié le 5 Février 2019

L'idée de départ est excellente : une femme tombe par hasard sur une lettre écrite par son mari « à ouvrir après ma mort ». Elle est terriblement tentée …

Ce livre regorge de suspens et de de rebondissements, avec une construction très efficace. Ce n'est pas de la grande littérature mais c'est un très bon divertissement.

 

 

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Rédigé par Hélène Daumas Objectif Livre

Publié dans #Littérature américaine

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Publié le 14 Décembre 2018

Très long roman policier avec chapitres en alternance avant/après. Trop long, dommage

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Rédigé par Hélène Daumas Objectif Livre

Publié dans #Littérature américaine

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Publié le 23 Novembre 2018

La construction de ce livre laisse à penser qu'il s'agit d'un « page turner » : de très courts chapitres où les personnages racontent les uns après les autres le déroulement des faits, après qu'un drame ait eu lieu.

Mais c'est bien mieux que cela, il y a du suspens – que s'est -il passé au juste ? - et aussi de la psychologie : qui sont ces personnages qu'on découvre au fil de leurs révélations ?

Le lecteur ressent l'inéluctable, la machine est bien rodée pour broyer les personnalités faibles. Il y a le dégoût face à cette jeune femme dressée pour réussir … à n'importe quel prix. Et enfin le vide intersidéral de ces vies, conditionnées par la publicité, formatées par une éducation qui retire la possibilité d'être soi. Tout ceci mène à l'horreur, sans le moindre remords.

La course à l'envie d'être célèbre est touchante et ridicule, puis devient inquiétante. Elle est utilisée par l'auteur pour démontrer que nos repères disparaissent. Les proies les plus faciles sont les personnes n'ayant pas reçu de valeurs solides durant leurs enfances. Elles rêvent d'être des gens importants sans avoir aucun effort à fournir.

La victime est le seul personnage qui est bon, travailleur, aimant jusqu'à l'aveuglement.

 

C'est cynique, sidérant et génial.

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Rédigé par Hélène Daumas Objectif Livre

Publié dans #Littérature américaine

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Publié le 14 Novembre 2018

Une fois encore j'ai été éblouie par son écriture simple et efficace, très visuelle, prompte à plonger dans n'importe quel sentiment. Cela a été rudement vérifié par cette histoire de haine folle au sein d'un couple et j'étais presque autant désespérée que les enfants de cette famille. Tout va mal et se dégrade inexorablement. Il est évident que la chute sera tragique et violente.

L'héroïne est le modèle de son mari artiste peintre. Il la déshabille, la met dans des positions humiliantes. Elle ne supporte plus ces situations dégradantes. Elle l'acceptait au départ pour l'argent et par fascination. Les enfants grandissent et c'est le déclic. Elle refuse de se représenter ce que les enfants pourraient ressentir s'ils la voyaient ainsi sur les tableaux. Heureusement, toutes les peintures ont été vendues - petite dénonciation au passage du voyeurisme des collectionneurs - mais elle comprend qu'avec internet, ils peuvent la voir ainsi.

Le personnage du mari est odieux, si odieux qu'il n'est pas crédible. Il fait croire à sa faiblesse pour mieux exercer son emprise, ses chantages … il mène la danse.

La question posée est la suivante : est-ce qu'un artiste peut tout se permettre ?

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Rédigé par Hélène Daumas Objectif Livre

Publié dans #Littérature américaine

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Publié le 10 Octobre 2018

Tout commence à la plage, ils sont jeunes, ils viennent de se marier … et sont tous seuls. Puis l'auteure nous détaille l'histoire de Lotto, le jeune marié, l'histoire de ses parents.

Lotto se conforme à ce qu'on lui demande, il a une réputation à tenir, il la tient. Il suit son instinct qui le guide à Mathilde. 

Il est toujours le petit garçon de son papa décédé et sa mère lui a coupé les vivres pour lui apprendre à grandir. Elle n'aime pas la belle-fille qu'elle n'a jamais rencontrée.

Celle-ci est juste bonne à baiser – c'est dans le livre à de nombreuses reprises – elle n'en demande pas plus, et doit faire bouillir la marmite. Pourtant, elle sait ce qu'il va faire, ce qu'il sera. Et lui se laisse guider, centré sur lui, ne s'intéressant pas du tout à Mathilde. C'est une sorte d'inversion des rôles « classiques » entre l'homme et la femme.

Nous suivons ce couple pendant plus de vingt ans, avec le regard posé sur lui. Elle prend le relais ensuite. Les révélations fracassantes permettent de « tenir » jusqu'à la fin.

Lauren Groff aime les digressions qu'elle place entre crochets pour mieux nous prendre à parti et prendre le parti de celui ou celle dont on parle à ce moment-là. Cela donne parfois l'impression de gagner du temps sur ce qui doit être ressenti et épargne les descriptions ou anecdotes fastidieuses à raconter. Ou alors c'est un parti pris pour mieux nous saisir … et ne pas nous laisser en spectateur.

Le récit s'emballe par moments, et hop, il change de direction. C'est peut-être la démonstration que le déroulement des évènements ne tient à pas grand chose. Le rythme est très inégal.

Les personnages sont déplaisants, ne suscitent pas d'intérêt, sauf à la fin, et ils sont assez tristes. J'avoue avoir ressenti un dégoût croissant à la lecture de ce livre, car rien de beau n'en sort. C'est une escalade de vengeance entre personnes blessées, cruelles et seules.

Là encore, il y a de la surenchère dans la violence pour entretenir l'intérêt du lecteur, sans laisser la place à la réflexion subtile. Que raconteront les romans américains dans dix ans ? Il paraît que Barack Obama a adoré ce récit, alors ce n'est pas prêt de finir.

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Rédigé par Hélène Daumas Objectif Livre

Publié dans #Littérature américaine

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Publié le 21 Septembre 2018

Elle a quatorze ans, vit seule avec son père dans une maison isolée sur une côte américaine. Son grand-père vit près d'eux dans son mobil-home, il est alcoolique.

Le père fait subir à sa fille toutes les violences possibles. Il est instruit et lit des livres de philosophie. Elle est très douée pour le maniement des armes et passe son temps libre à les nettoyer.

Nous sommes dans la tête de Julia, incapable de saisir les mains qui se tendent, loyale envers son père.A la moitié du livre, on pense qu'il ne pourra plus rien arriver de pire que ce qui s'est déjà passé, mais non, ce n'est pas fini.

Tallent aime les répétitions : elle se traite de petite connasse, elle gobe des œufs pour son petit déjeuner et jette les coquilles dans le compost, elle lance la bière à son père à la cuillère. Ces répétitions accentuent sans doute le désespoir, elles peuvent donner l'impression que tout est immuable.

Le rythme est haletant, il ne laisse pas de place au recul, à la réflexion, tout s'enchaine si vite. Par exemple, je ne me suis pratiquement jamais demandé ce qui fait que le père est si épouvantable. Je pensais seulement à sa fille, comment et quand elle pourrait s'en sortir. J'ai ressenti du voyeurisme en continuant à lire.

Mais nous sommes dans la tête de Julia, elle non plus ne se pose pas de questions au sujet de son père et nous n'avons pas d'élément pour expliquer ce père imprévisible.

Certains livres où la violence est reine, évitent de nous ressentir comme voyeurs. Je pense à « La malédiction des colombes » ou « La chorale des maîtres bouchers » de Louise Erdrich.  Faut-il une quantité de violence suffisante pour plaire ? Pour retenir l'intérêt de lecteurs blasés ? Je pense aux « Professeurs de désespoir » de Nancy Huston qui s'appliquaient dans le registre pour choquer et interpeller les lecteurs anémiés.

Car ce roman a été un best-seller lors de sa sortie aux Etats-Unis en 2017. Est-ce une dénonciation des armes à feu ? Le père n'a pas besoin d'elles pour maltraiter sa fille.

Tallent décrit très précisément la nature, en citant de nombreuses plantes inconnues. A un moment, le père évoque les obèses, incapables de prendre soin d'eux d'après lui, et du coup, insensibles à dégradation de la planète. Cette remarque est surprenante de sa part, car il n'hésite pas à brûler du plastique en quantité. Complètement déroutant.

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Rédigé par Hélène Daumas Objectif Livre

Publié dans #Littérature américaine

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Publié le 13 Septembre 2018

Wendy vit à New York, elle a treize ans. Elle veut rejoindre son père qu'elle connait à peine en Californie. Sa mère s'y oppose. Le compagnon de celle-ci est parfait et ils ont un petit garçon de quatre ans. Wendy adore son petit frère. Amélia est sa meilleure amie, elle est « prête à tout » (titre d'un autre livre de Joyce Maynard ...).

Bref, elle mène une vie sans histoire, ou presque. Et puis le 11 Septembre, tout bascule. La mère ne rentre pas de son travail dans une des tours jumelles. C'est l'attente infernale. Voici juste le début de ce roman.

L'auteur nous laisse entendre qu'il est plus aisé d'être jeune face à l'adversité, il est nécessaire de laisser le libre arbitre aux victimes pour les aider et toute forme d'art : dessin, musique, lecture est un baume pour l'âme blessée.

« Frankie Adams » de MacCullers et « Le journal d'Anne Frank » sont les livres de chevet de l'héroïne qui se construit non seulement par son épreuve mais aussi dans ces lectures.

Il y a des passages très forts d'humanité, où un personnage peu attrayant de prime abord, se révèle d'une grande philosophie.

Le message le plus important reste qu'il faut toujours beaucoup d'amour avec quiconque et dans n'importe quelle circonstance. C'est la seule richesse qui reste au delà de la mort. Et les souvenirs de cet amour restent pour ceux qui n'ont d'autre choix que de continuer à vivre, et cela les rend forts pour surmonter le chagrin.

La solitude des personnes de l'entourage des disparus est immense dans cette histoire. Rien ne leur est proposé, ils doivent mettre leurs petits papiers de recherches partout sur les murs de la ville, en souhaitant un signe quelconque. Aucune aide ne leur vient. Et ils vivent une situation inédite, difficile à décrire. Joyce Maynard nous amène à ces gens par le biais de ce roman.

J'ai été gênée par certaines réactions de Wendy, trop mâture à mon goût et qui m'ont empêchée d'y croire par instants. En revanche, le récit est très bouleversant.

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Rédigé par Hélène Daumas Objectif Livre

Publié dans #Littérature américaine

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Publié le 12 Août 2018

L'histoire se passe de nos jours en Californie ; une jeune femme, Mae, débute dans une société appelée le Cercle. Mae est solide, sûre d'elle, elle sait ce qui lui convient, comme sortir en kayak pour se retrouver. Elle est heureuse d'être embauchée, se sent privilégiée d'avoir été choisie. D'entrée de jeu, le malaise est là : son amie qui l'a cooptée lui fait une sombre blague à son arrivée dans l'entreprise.

Le Cercle est une société high tech, un mélange de Google, Apple, mais en plus grand. Il y a tout ce qu'il faut sur place pour que les dix mille employés se sentent chez eux, y compris des chambres d'hôtel améliorées … des fois que le temps ait si vite filé au travail. Mae est confiante, elle ne remarque pas trop les attitudes étranges, ou elle préfère ne pas les voir. Assez vite le piège se referme sans qu'elle s'en rende compte et les responsables de cette entreprise ont des comportements semblables à ceux des gourous de secte.

Cette dystopie est très agréable à lire même si l'auteur ne se prive pas de décliner tout le fonctionnement du Cercle, avec force chiffres et détails qui ajoutent à la gêne. Les mots employés par Cercle sont Communauté, Like, … toute ressemblance avec ce que vous savez n'est sans doute pas fortuite.

Le livre, publié aux Etats Unis en 2013, est pour moi une dénonciation de nos choix de société faits sans notre consentement. Or c'est ce qui nous arrive déjà. Les revenus doivent désormais être déclarés par internet. Tout savoir sur la santé d'un patient via sa carte vitale permet de transmettre ensuite ces informations aux mutuelles. Celles-ci sont des organismes privés qui ne se « privent » pas d'exploiter toutes ces données.

Dans ces deux cas, l'Etat décide qu'il en sera ainsi. Mais pour combien de temps ? Qui décide des recherches à mener ? Certaines sociétés privées très riches peuvent déjà se permettre de chercher des moyens de prolonger la vie, de conserver les ovocytes de leurs employées … sans aucun débat éthique.

Le Cercle supplante les politiques sans difficulté, impossible de ne pas penser aux fake news, aux dernières élections américaines où les réseaux sociaux ont eu un rôle certain. Il n'y a aucun intellectuel ni journaliste dans cette histoire.

L'héroïne est obsédée par l'amour virtuel des autres, conditionnée par le discours ambiant, très manipulateur, où tout repose sur la crainte de déplaire. Or est-ce si grave de déplaire ? Non, bien sûr. Pourtant Mae est désespérée dès qu'il lui manque un « like ». Le rythme effréné des tâches à accomplir et les efforts à faire pour faire partie activement de la communauté, l'empêchent d'avoir du recul et de penser.

Par ailleurs, il est impossible de refuser de faire partie du système, c'est à dire de regarder sans cesse les autres, sans cesse parce qu'il y a stimulation constante, et d'accepter d'être observé. Les moyens de surveillance sont tels qu'il faut bel et bien disparaître pour y échapper, et ce, au prix de l'éloignement et de l'isolement total.

Eggers nous fait respirer un peu en introduisant un personnage énigmatique qui va à l'encontre de ce Cercle oppressant. Mae est intriguée, mais est surtout très attirée sexuellement par lui. Elle enfreint les règles seulement dans le cas où son instinct sexuel prend le dessus. Celui-ci ne peut pas être manipulé. L'introduction de ce personnage est géniale car le lecteur ne peut s'empêcher de se demander si il ne s'agit pas d'une mise à l'épreuve de Mae.

Le Cercle est un livre dérangeant, mais son univers est plausible. Quelle sera la prochaine frontière franchie dans le tout numérique ?

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Rédigé par Hélène Daumas Objectif Livre

Publié dans #Littérature américaine

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